Désillusions

desillusions

Auteur : Melrika Roffray

Date de publication : 06 mai 2020

ISBN : 978-2-9534938-N-2.130

Nombre de pages : 14

Genre : nouvelle policière

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La soirée avait bien commencé. Ils avaient préparé un dîner pour eux et quelques amis. Ils avaient ri dans la cuisine, s’étaient embrassés, taquinés, bref tout paraissait aller pour le mieux. Le repas avait été gai, amusant, les mets appréciés et les convives semblaient enchantés. Pierre était resté pour la nuit. Comme il habitait loin, en banlieue, et que le dernier train était parti depuis un bon moment, on lui avait offert le canapé du salon.
Elle, après avoir rangé la table et mis la vaisselle dans le lave-vaisselle, était allée dans la chambre. Lui avait discuté un peu avec Pierre avant de la rejoindre. Que s’étaient-ils dit exactement pour que les choses tournent comme ça ? Elle l’ignorait.

Il avait commencé à l’embrasser, la caresser, l’exciter. Il connaissait tous les replis de son corps et savait exactement comment la rendre ivre de désir. Au moment où il la planta sur son sexe, attirant sa tête vers sa bouche, elle s’était sentie pénétrée par derrière. Sodomisée par quelqu’un qu’elle n’avait pas entendu entrer ! Alors même que lui la remplissait de son sexe ! Elle avait poussé un cri, s’était débattue et avait pris la fuite. En pleine nuit. Jusqu’à son appartement. Heureusement qu’elle avait gardé son logement en dépit de ses tentatives pour qu’elle vînt s’installer chez lui définitivement.
***
Il s’installa face à elle, commanda une pression et l’observa longuement.
– Tu voulais qu’on parle, je t’écoute, dit-il sobrement.
En le voyant, l’air dégagé, innocent, elle sentit un vague malaise monter en elle. Elle but une gorgée de café, pour se donner une contenance, repenser au petit laïus qu’elle avait préparé mentalement.
– Oui, je voulais te dire que … que je ne suis pas d’accord avec ce qui s’est passé hier soir.
– Mais pourquoi ? Tu prétends m’aimer et à la première petite frasque tu veux me quitter ?
– Oui, je t’aime, mais je ne suis pas prête à tout accepter.
– Oh ! Pourtant tu n’es pas une jeune pucelle dépourvue de savoir-faire.
– Je ne vois pas le rapport ! Un homme à la fois, telle est ma devise. Je ne partage pas et je ne me partage pas. C’est comme ça. Ce n’est pas parce qu’on parle d’amour qu’on doit tout accepter de l’autre. Je ne suis pas d’accord. Tu ne m’en as même pas parlé, nous n’avons jamais abordé le sujet et tu ne m’as même pas demandé si l’expérience me tenterait. Ça va ? Ton ami Pierre s’est remis de sa frustration ? Je ne suis pas à vendre ! Je ne suis pas à partager, même avec ton meilleur ami ! Vous aviez prémédité votre coup en douce ? C’est pour ça que tu lui as proposé de rester coucher sur ton canapé ?
– Oh ! quoi ce n’est que du sexe, un fantasme qu’on voulait réaliser, c’est tout.
– Eh ! bien, tes fantasmes … tu vas aller les réaliser avec une autre. Je ne suis pas de cette eau-là !
– Finalement, tu es très pudibonde dans ta manière de réagir.
– Quoi ? Pudibonde ? Parce que je t’aime et que je ne veux être qu’à toi et pas à tes copains, je suis pudibonde ?! J’aurais tout entendu vraiment ! Je pouvais accepter que tu aies des fantasmes, qu’on essaye d’en réaliser ensemble, mais rien que toi et moi. Le sexe et l’amour dans le sexe, c’est intime. Je t’aime avec ma tête, moi, pas avec mon cul. D’accord ? Il y a des tas de choses que je peux accepter de l’homme que j’aime, mais là… vraiment… tu es allé trop loin.
– Toute une histoire pour un vague fantasme sexuel, vraiment je ne m’attendais pas à ça de ta part.
– Ce qui prouve que tu me connais mal et que nous n’avons plus rien à faire ensemble.
Ayant dit cela, elle prit son sac, prête à se lever.
– Bah ! tu es amoureuse de moi, tu me reviendras.
Elle le toisa et sortit précipitamment du café.

***

Elle marchait d’un pas vif. On aurait dit qu’elle avait besoin de cette allure pour se calmer. Puis, petit à petit, elle ralentit. Laissa errer son regard sur les vitrines des magasins qu’elle longeait. Elle repensait à ce qu’elle avait dit, en soupesait chaque mot. Il n’avait rien compris. Sa dernière remarque le montrait bien. Il était persuadé qu’elle allait lui revenir. Ah ! l’imbécile ! qu’est-ce qu’il croyait ? Qu’il était irrésistible ? Mais pour qui se prenait-il ? Elle en était soufflée ! Il semblait avoir oublié qu’elle avait déjà fait un choix, plus jeune. Elle était amoureuse, alors, très amoureuse. Une relation qui avait duré trois ans. Ils se voyaient épisodiquement du fait de leurs études dans des villes séparées, mais ils s’écrivaient … de longues lettres. Un jour, il lui avait fait part de ses doutes. Ils s’étaient fait un serment, certes, mais il avait rencontré une autre jeune femme et il hésitait entre elle et l’autre. Quand il lui avait demandé ce qu’il devait faire, elle n’avait pas hésité. Le cœur en morceaux, elle lui avait répondu que le choix était tout simple et que ce ne serait pas elle. S’il l’avait vraiment aimée, avait-elle ajouté, il ne lui aurait jamais demandé de choisir pour lui. Il aurait su vers laquelle aller. Elle lui avait demandé de ne plus jamais la contacter. Et elle avait pleuré tout son soûl durant des jours. Puis elle avait tourné la page, le cœur gros, mais sûre d’avoir fait le bon choix.

Alors lui, là, il pouvait toujours rêver s’il pensait qu’elle lui reviendrait. Une fois ses larmes séchées, son cœur anesthésié, elle continuerait sa route, coûte que coûte. Enfin, elle n’en était pas encore là. Dans l’immédiat, il lui faudrait se remettre de ce nouvel échec amoureux. Décidément, elle ne savait pas choisir les hommes de sa vie. Il lui faudrait du temps pour se remettre, elle le savait. Elle savait aussi qu’elle s’en remettrait. Les déchirures de l’âme, elle connaissait. Même si ça cicatrisait, petit à petit, il restait toujours une douleur quelque part qui remontait de temps en temps. Mais on s’y habituait. Heureusement. Elle pensait plutôt : malheureusement. A force de souffrir, on finissait par ne plus ressentir les douleurs de la même façon et ça restait, lancinant, au fond de soi, on apprenait à vivre avec, finalement. Etait-ce un bien ? Un mal ? Elle l’ignorait.

Elle s’engouffra dans un immeuble, retenant ses larmes. Le relâchement serait pour ce soir, dans le cocon de son appartement.

L’homme resta un moment devant la porte de l’immeuble. Allait-elle ressortir ? Il attendit, puis finalement opta pour noter l’adresse. Il reviendrait, il finirait bien par la voir, un jour ou l’autre.

Il n’avait pas fait exprès de suivre la conversation. Le ton avait monté, petit à petit sans que les deux protagonistes s’en rendent compte. Le discours de la femme lui avait plu…



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